En 2022, le secteur du private equity a connu une année contrastée, caractérisée par une diminution à la fois en valeur et en volume des transactions par rapport à l’année précédente. Cette situation a été exacerbée par des facteurs géopolitiques et économiques perturbateurs. Dans ce contexte, nous allons nous concentrer sur les évolutions significatives ayant marqué les managements packages. Il s’agit d’un mécanisme permettant aux managers et aux salariés de partager la valeur créée avec les investisseurs financiers. Nous nous appuierons sur les résultats d’une analyse multisectorielle portant sur plus de 180 managements packages entre 2018 et 2022. Le point sur le sujet avec Edouard Coencas.
Les Actions Gratuites de Préférence (AGADP) gagnent en popularité
Depuis le revirement de la jurisprudence en 2021, les acteurs ont préféré les AGADP, des actions avec des droits particuliers attribués gratuitement, plutôt que les Bons de souscription d’actions (BSA), qui permettent de souscrire à des actions à un prix prédéterminé. En juillet 2021, trois arrêts ont requalifié les gains issus de management packages basés sur les BSA en salaires. Ainsi, la part des AGADP est passée de 9 % en 2019 à 31 % en 2022. Les actions de préférences ratchet classiques restent cependant l’instrument le plus utilisé, représentant les 69 % restants en 2022. Le plafond de 10 % du capital social et la période d’attribution et d’acquisition d’au moins deux ans peuvent être des obstacles significatifs à l’utilisation des AGADP pour certains acteurs.
Les valorisations augmentent pour les rétrocessions ciblées
En 2022, la valeur du management package à l’émission par rapport à l’espérance de gain cible à la sortie a augmenté pour atteindre près de 10,5 %, contre une moyenne d’environ 8,5 % sur la période 2018-2021. Cette augmentation est probablement due aux niveaux de volatilité plus élevés causés par les conditions économiques et géopolitiques actuelles, qui ont entraîné une augmentation des niveaux de valorisation des instruments optionnels. En outre, la diminution des multiples observés pour les fonds de private equity en 2022 a pu entraîner une baisse des multiples attendus par les acteurs, ce qui a entraîné une diminution des rétrocessions cibles. En général, la valeur du management package oscille entre 5 % et 15 % de la rétrocession cible. Cependant, en raison de la volatilité actuelle des paramètres de marché, il est essentiel de procéder à une réévaluation des fonds propres par un expert avant d’évaluer le management package.
Réduction du taux de rétrocession déclenché au premier seuil
En examinant le premier seuil de rétrocession, il est possible de constater une évolution défavorable pour les managers en termes de rapport de force avec les investisseurs. En effet, le pourcentage de rétrocession au premier seuil a diminué considérablement, passant de 18% en 2021 à près de 10% en moyenne en 2022. Ce seuil est généralement fixé lors des négociations entre les managers et les investisseurs financiers, et cette diminution peut indiquer que les investisseurs financiers ont eu un rôle prépondérant dans ces négociations.
Bien qu’il soit encore trop tôt pour tirer des conclusions sur l’année 2023, il semble que des changements significatifs soient en cours. Il est probable que la montée en puissance des AGADP se poursuivra, étant donné que le projet de loi de finances pour 2023 ne prévoit aucune évolution significative concernant la plus-value attribuée aux AGADP, ni de modification sur la Flat Tax pour la plus-value sur valeur mobilière.